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Ce problème aborde quelques phénomènes physiques liés à l'existence d'une interface entre deux phases d'un même corps. La section B peut être abordée en admettant la relation de Laplace donnée à la question A6). De même, la section C peut être traitée en admettant certains résultats de la section A . Enfin, bien que la section D constitue un exercice de synthèse, certaines questions peuvent être résolues indépendamment du reste du problème.
Données numériques
Constante de Boltzmann
Constante des gaz parfaits
Accélération de la pesanteur
Pression atmosphérique
Caractéristiques physiques de l'eau pure à 300 K :
Masse volumique
Masse molaire
Viscosité dynamique
Énergie libre de surface
Pression de vapeur saturante
A Thermodynamique d'un système diphasique.
On considère un système constitué d'un seul composant sous deux phases, liquide ( ) et gazeuse ( ), séparées par une interface (cf. Fig. 1). Chaque phase est caractérisée à l'équilibre par trois variables, indicées par où , dont une au moins doit être extensive, choisies parmi les couples entropie/température ( ), volume/pression ( ), nombre de moles/potentiel chimique ( ). L'aire de l'interface est .
Figure 1: Système diphasique.
A1) On ne tient pas compte ici de l'interface. Le système est isolé. On suppose que la phase liquide est suffisamment étendue pour jouer vis-à-vis de la bulle de vapeur le rôle de réservoir d'énergie (thermostat), de volume et de particules. Ainsi, les variables intensives et seront considérés comme des paramètres constants.
On laisse évoluer à partir d'un état quelconque initialement contraint, c'est-à-dire qu'on supprime les contraintes de façon à ce que les variables extensives ( ) soient libres de s'ajuster jusqu'à l'équilibre thermodynamique. Les variations associées à cette transformation sont notées avec les indices correspondant à chaque phase.
a) Quelle relation existe-t-il entre et d'une part, et d'autre part?
b) La transformation subie par est-elle réversible?
c) En appliquant les deux principes de la thermodynamique à , exprimer la quantité de chaleur et le travail fournis par à en fonction de et des paramètres intensifs caractérisant le liquide.
d) Montrer que la fonction ne peut que décroître lors de ce processus, où on a défini :
avec l'énergie interne de .
A2) Déduire de ce qui précède qu'à l'équilibre thermodynamique:
Donner la signification physique de chacune de ces égalités.
A3) On rappelle que le potentiel chimique d'un système d'un seul composant n'est autre que l'enthalpie libre molaire:
Donner l'expression de et en fonction de variables thermodynamiques du système.
A4) On note la pression d'équilibre (pression de vapeur saturante) à la température .
a) Justifier que et ne sont pas des variables indépendantes et donner la relation qui les relie implicitement.
b) En déduire la relation de Clapeyron pour le changement de phase en précisant soigneusement la signification des grandeurs physiques introduites.
c) Représenter schématiquement la courbe dans le diagramme de phase de l'eau.
A5) On considère dans la suite du problème que la température est constante et uniforme dans tout le système : .
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On tient compte de l'existence d'une interface en attribuant à une énergie libre :
où est appelée énergie libre de surface et où et sont respectivement l'énergie interne et l'entropie de surface. En outre, on considère que l'interface ne contient pas de particules et occupe un volume nul ( est alors également une enthalpie libre).
Le système est toujours thermiquement isolé, mais un opérateur extérieur fournit un travail afin d'effectuer une transformation la plus générale possible du système , entraînant des variations .
a) Montrer que :
où a la même définition qu'à la question A1).
b) Préciser comment l'opérateur doit agir afin de ne fournir que le travail minimal nécessaire . Quelle est alors la part du travail consacrée à l'extension de ?
c) Démontrer que la quantité de chaleur fournie par et à est alors :
On pourra utiliser que .
A6) On considère que l'interface est sphérique de rayon et englobe la phase . En s'inspirant des questions A1) et A2), et en remarquant que le volume et la surface d'une sphère ne sont pas des variables indépendantes, démontrer la relation suivante, valable à l'équilibre thermodynamique:
A7) Calculer pour une bulle de vapeur d'eau de rayon immergée dans son liquide à .
Que vaut dans le cas d'une interface plane?
B Ascension capillaire.
On plonge un capillaire cylindrique en verre, de rayon , dans un bécher rempli d'un liquide pur en contact avec sa vapeur à la pression . On observe que le liquide monte dans le capillaire (Fig. 2). Plus précisément, l'interface liquide/vapeur (le ménisque) dans le capillaire ouvert est un hémisphère de rayon dont le sommet se trouve à l'altitude au dessus de la surface du liquide dans le bécher.
B1) Expliquer qualitativement le phénomène observé. On utilisera la relation de Laplace établie à la question A6) que l'on supposera valide pour une interface hémisphérique
c) Montrer alors que la loi d'ascension capillaire est solution de l'équation différentielle :
B5) Résoudre cette équation dans la limite où . On notera un temps initial d'intégration pour lequel .
B6) La figure 3 représente les données expérimentales obtenues pour l'ascension d'une huile silicone de densité égale à celle de l'eau dans un capillaire de rayon .
Figure 3: D'après D. Quéré, Europhysics Letters, 39, 1997
Montrer que ces données sont compatibles avec la loi trouvée à la question précédente et en déduire une estimation numérique de et de pour l'huile.
Seuls les résultats comportant un nombre raisonnable de chiffres significatifs seront pris en compte.
B7) La solution trouvée en B5) devient illégitime lorsqu'elle s'approche de . Donner une expression du temps au bout duquel la solution du B6) vaudrait . Que vaut ce temps expérimentalement?
B8) Que devient l'équation différentielle du B5) lorsque en se limitant au premier terme significatif ? Montrer que l'altitude relaxe exponentiellement vers son asymptote avec un temps caractéristique .
B9) On peut lire dans la littérature que le "temps d'imbibation" d'un milieu poreux se comporte comme :
où est le rayon typique des pores et où est une constante dont on précisera la dimension.
Commenter et analyser cette loi (dite de Washburn) à la lumière des résultats obtenus dans cette section.
B10) Dans les premiers temps de l'ascension, outre le fait que le ménisque n'est qu'approximativement sphérique, on ne peut pas négliger l'inertie du fluide. Tenter
d'expliquer pourquoi. On montre que l'ascension du ménisque s'effectue alors à vitesse constante :
où , et sont des nombres que l'on déterminera à partir de considérations dimensionnelles, et une constante numérique de l'ordre de l'unité que l'on ne cherchera pas à évaluer.
B11) Estimer pour l'huile silicone de la question B6) en prenant .
C Nucléation homogène de vapeur dans un liquide métastable.
On reprend les notations de la section A . On s'intéresse donc à la coexistence d'une bulle sphérique de vapeur ( ) avec son liquide ( ). La température des deux phases sera toujours prise homogène et notée .
On considère un liquide à une pression inférieure à la pression de vapeur saturante en présence d'une interface plane, . On note:
Dans ces conditions, l'état d'équilibre thermodynamique du système est la phase vapeur. En pratique un tel système peut cependant se maintenir très longtemps dans un état liquide dit "métastable". On cherche dans cette section à préciser la nature de cette métastabilité.
C1) Montrer que pour un rayon particulier (rayon "critique"), la bulle de vapeur est en équilibre avec le liquide ; on utilisera que les potentiels chimiques des deux phases sont alors égaux. On établira une relation donnant implicitement et on vérifira que cette relation est compatible avec l'existence de .
C 2 ) Afin de résoudre l'équation obtenue à la question C 1 ), on va préciser l'expression des potentiels chimiques du liquide et de la vapeur. On prendra comme état de référence ( ) et on notera .
a) On suppose que le liquide est incompressible, de volume molaire . Exprimer en fonction de et .
b) On suppose que la vapeur est assimilable à un gaz parfait. Exprimer en fonction de et , constante des gaz parfaits.
C 3 ) Déduire de ce qui précède que :
On note le volume molaire de la vapeur à la pression et on suppose qu'on est assez loin du point critique pour que et soient très différents.
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C4) Calculer numériquement et pour de l'eau à 300 K ; montrer que dans ces conditions s'exprime simplement en fonction de et seuls, tant que reste très inférieur à une valeur qu'on précisera. Que vaut dans cette limite?
C 5 ) Calculer numériquement pour de l'eau à valant successivement . Commenter les valeurs de dans les deux derniers cas. Connaissez-vous une situations physique dans laquelle on rencontre de telles pressions et où la formation de bulles ("cavitation") est nuisible ? On considère ici le sous-système initialement contitué de moles de liquide métastable, à la pression , qui se transforment en moles de vapeur sous forme d'une bulle spérique de rayon , le reste du liquide ( ) restant inchangé.
a) En appliquant le résultat obtenu à la question A5), calculer le travail minimal qu'un opérateur extérieur aurait à fournir pour créer cette bulle et l'interface qui lui est associée. Montrer que ce travail peut se mettre sous la forme :
On pourra faire intervenir la variation d'enthalpie libre du système (cf. A3).
b) Simplifier cette expression lorsque vaut alors que l'on exprimera d'abord en fonction de et puis en fonction de et , dans la limite des faibles discutée en C 3 .
C7) Que deviennent les bulles de rayon (resp. )? On raisonnera sur la façon dont varie le potentiel chimique de la phase vapeur lorsque le rayon de la bulle diffère du rayon critique. Comment qualifier l'équilibre de la bulle de rayon critique ? Représenter qualitativement .
C8) En l'absence d'opérateur, le travail minimal nécessaire pour créer une bulle peut être pris sur les fluctuations thermiques du système dont l'échelle d'énergie caractéristique est . Plus précisément, le nombre de bulles de rayon critique formées par unité de temps et de volume d'eau métastable est :
où est une constante que l'on prendra égale à pour de l'eau à 300 K .
a) Calculer pour que . Quel est le rayon critique correspondant? Commenter ces valeurs. Changent-elles beaucoup si on prend comme critère ? Comment expliquent-elles la persistence de l'eau liquide sous forme métastable?
b) Que vaut pour l'eau où ? Calculer pour que à cette température (on supposera que et conservent les mêmes valeurs qu'à 300 K ). Pourquoi arrive-t-on à faire bouillir de l'eau dans une casserole ?
D Montée de la sève dans les grands arbres.
On assimilera toutes les caractéristiques physiques de la sève à celles de l'eau pure à 300 K .
D1) Quelle différence de pression hydrostatique existe-t-il dans la sève d'un arbre entre la base et le haut du tronc? On notera la différence d'altitude. Calculer numériquement cette valeur pour un chêne de hauteur . En supposant que la base du tronc est à la pression atmosphérique, dans quel état se trouve la sève au sommet?
D2) Comment le résultat de la question précédente est-il modifié du fait que la sève a une vitesse d'ascension moyenne ? On considèrera que les canaux du xylème empruntés par la sève sont rectilignes et cylindriques de rayon . On prendra les valeurs correspondant à un chêne dans son activité de mi-journée : .
D3) Un ménisque liquide/vapeur, supposé hémisphérique, est-il suffisant pour maintenir la colonne de sève dans son canal ? Quel serait le rayon d'un vaisseau permettant de soutenir la sève dans ces conditions?
D4) Quel est le taux de formation de bulles de vapeur au sommet de l'arbre si on ne tient compte que de la nucléation homogène étudiée dans la section C ? Commenter.
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