LUNDI 14 AVRIL 2025
08h00-12h00
FILIERES MP-MPI - Epreuve n
MATHEMATIQUES A (XULSR)
Notations
On note l'ensemble des entiers naturels strictement positifs. On note le corps des nombres complexes. Tous les espaces vectoriels sont sur . On note l'anneau des polynômes en une indéterminée à coefficients complexes et le corps des fractions rationnelles en . Pour et entiers naturels, on note l'espace des matrices de taille . Lorsque l'on a on le note simplement . On note le groupe des matrices inversibles dans . On note la matrice nulle de . On note (resp. ) la matrice nulle (resp. la matrice identité) de . Étant donné deux matrices carrées et , on construit une matrice diagonale par blocs:
où les « 0 » désignent des matrices nulles de tailles convenables. La notation s'étend naturellement à un nombre fini de matrices carrées ( ) appelées alors blocs diagonaux de la matrice ainsi construite. Étant donné un entier naturel non nul et une -liste , on note la matrice diagonale dont les coefficients diagonaux sont, dans l'ordre, . Dans ce problème, étant donné un entier naturel non nul, on appelle bloc de Jordan de taille la matrice suivante :
(tous les coefficients de sont nuls sauf ceux d'indice pour , qui valent 1 ). La matrice est la matrice nulle (0). Une matrice est dite diagonale par blocs de Jordan si elle est diagonale par blocs avec des blocs diagonaux qui sont des blocs de Jordan. Étant donné un espace vectoriel , on note id l'identité de . Étant donné un espace vectoriel et un endomorphisme de , un sous-espace de est dit stable par si . On note alors l'endomorphisme de induit par , c'est-à-dire .
Objectifs et structure du problème
Le premier objectif du problème est de donner une démonstration du fait qu'une matrice nilpotente est semblable à une matrice diagonale par blocs dont les blocs diagonaux sont des blocs de Jordan. Après la partie [1], qui regroupe quelques résultats utiles pour la suite, la démonstration occupe les parties II à IV.
Une fois ce théorème établi, on en démontre dans la partie Vune version dite «graduée», c'est-à-dire en présence d'une matrice diagonalisable satisfaisant à certaines relations particulières. Ce résultat est utilisé pour donner une forme normale pour les matrices des couples d'applications linéaires ( ). Enfin, dans la partie VI, on utilise la version «graduée» de la partie précédente pour classer les couples de matrices rectangulaires à équivalence simultanée près.
I Questions préliminaires
Restriction d'un endomorphisme diagonalisable à un sous-espace stable
Soit un espace vectoriel de dimension finie, soit un endomorphisme de et soit un sousespace stable par . On note l'endomorphisme de induit par , c'est-à-dire , . Démontrer que si est diagonalisable, alors est aussi diagonalisable.
Un invariant matriciel
Pour une matrice carrée et un entier naturel non nul, on note
a) Démontrer que si deux matrices carrées et sont semblables, alors pour tout .
b) Soit un entier naturel non nul. Vérifier que pour tout entier non nul, vaut 1 si et 0 sinon.
c) Soient et deux matrices carrées et soit . Démontrer la relation puis que pour tout entier non nul,
On pourra utiliser sans le démontrer le fait que toutes ces relations s'étendent à une matrice diagonale par blocs .
II Algèbre linéaire sur les polynômes de Laurent
L'espace des polynômes de Laurent est le sous-espace vectoriel noté de engendré par la famille . C'est une sous-algèbre de . On note le sous-espace vectoriel de engendré par la famille libre : c'est un supplémentaire de dans :
On note la projection sur parallèlement à . Ainsi, pour ,
L'application linéaire et l'endomorphisme
On note l'application linéaire qui à un polynôme de Laurent associe
c'est-à-dire l'endomorphisme de induit par (la lettre («xi») évoque le produit par ).
a) Soit un élément de . Démontrer que .
b) Soit un polynôme et soit un élément de . Démontrer que .
Image et noyau des puissances de
Soit un entier naturel. Démontrer que est surjectif et donner une base du noyau de .
Sous-espaces cycliques
Soit un entier naturel non nul. Démontrer que le plus petit sous-espace vectoriel de contenant et stable par admet pour base . Écrire la matrice de l'endomorphisme induit par sur dans cette base.
III Prolongements compatibles
Soit un espace vectoriel de dimension finie muni d'un endomorphisme nilpotent. On suppose qu'il existe un sous-espace vectoriel de stable par et une application linéaire tels que
Étant donné un sous-espace de qui contient et qui est stable par , on dit que admet un prolongement à compatible avec s'il existe une application linéaire telle que
(i) la restriction de à est ;
(ii) .
Le but de cette partie est de démontrer que admet un prolongement à compatible avec .
Prolongement compatible avec donné par un vecteur
Dans cette question, on suppose que est strictement inclus dans et on fixe un vecteur de qui n'appartient pas à .
a) Vérifier que l'ensemble
est un idéal de .
b) Démontrer qu'il existe un entier naturel tel que . En déduire que est engendré par le monôme pour un entier naturel convenable que l'on ne demande pas de préciser.
c) Soit le sous-espace de défini par
Vérifier que contient et et qu'il est stable par .
On note
d) Démontrer qu'il existe un élément de tel que
e) Soit un polynôme et soit un élément de . Démontrer que si , alors .
f) Soit un élément de . Soit un polynôme et soit un élément de tels que . Démontrer que l'élément ne dépend que de et pas du choix de et . Vérifier alors que l'application ainsi définie est un prolongement de à compatible avec (il n'est pas demandé de vérifier que est linéaire, ce que l'on admettra). Prolongement à compatible avec
Démontrer que admet un prolongement à compatible avec .
IV Théorème de décomposition pour les endomorphismes nilpotents
Soit un espace vectoriel de dimension finie sur et soit un endomorphisme de . On suppose que est nilpotent d'indice , c'est-à-dire que et .
Scindage d'un sous-espace cyclique maximal
On choisit un vecteur tel que n'est pas nul.
a) Vérifier que la famille est libre et que le sous-espace qu'elle engendre contient et est stable par . Écrire la matrice de l'endomorphisme induit dans cette base.
b) Démontrer qu'il existe une application linéaire injective telle que .
D'après la partie III, cette application linéaire admet un prolongement compatible avec .
c) Vérifier que l'image de est contenue dans le noyau de .
d) Démontrer que le noyau de est un supplémentaire de stable par .
Théorème de décomposition : existence
Soit un endomorphisme nilpotent d'un espace vectoriel de dimension finie.
Démontrer qu'il existe une base de , un entier naturel et des entiers naturels non nuls dans laquelle la matrice de est diagonale par blocs et dont les blocs diagonaux sont des blocs de Jordan de tailles respectives .
(Les expressions «diagonale par bloc» et «bloc de Jordan» sont définies dans les préliminaires.)
Théorème de décomposition : unicité de la taille des blocs
Démontrer que le nombre et les tailles des blocs qui apparaissent dans la question ne dépendent que de et pas du choix de la base. On pourra utiliser la question 2 .
V Version «graduée» du théorème de décomposition
Dans cette partie, on se donne :
un espace vectoriel de dimension finie;
un endomorphisme nilpotent de ;
un entier naturel non nul et le nombre complexe («zêta»)
un endomorphisme inversible de tel que
Propriétés de
a) Démontrer que est diagonalisable.
b) Soit un entier naturel strictement plus petit que . En notant et , vérifier que .
c) Calculer, pour entier relatif, et, pour entier naturel, .
Recherche d'un supplémentaire stable
Soit un sous-espace vectoriel de stable par et . On suppose que admet un supplémentaire stable par et on cherche un supplémentaire de stable par et . Soit le projecteur sur parallèlement à .
a) Vérifier que et commutent.
On note
b) Démontrer que l'image de est incluse dans et que pour dans , on a .
c) En déduire que est un projecteur et que son image est .
d) Démontrer soigneusement que commute avec et .
e) En déduire que le noyau de est un supplémentaire de et qu'il est stable par et .
Version «graduée» du théorème de décomposition
a) Soit l'indice de , c'est-à-dire l'entier tel que et . Démontrer qu'il existe un vecteur tel que est un vecteur propre de et .
b) Démontrer qu'il existe une base de dans laquelle les matrices de et sont diagonales par blocs et les blocs diagonaux sont respectivement de la forme
pour et convenables.
On appellera ( ) le type d'un tel couple de matrices ( ).
Un exemple
Dans cette question, on suppose de plus que
Pour , on note . D'après b), la donnée de équivaut à la donnée des deux applications linéaires et induites par .
a) Vérifier que .
b) Construire des couples ( ) qui donnent lieu à six types différents de couples de blocs diagonaux ( ) dans la version «graduée» du théorème de décomposition.
c) Démontrer que le nombre de blocs de chaque type est déterminé par la donnée des trois dimensions et des trois rangs et .
VI Classification des couples de matrices rectangulaires
Dans toute la suite, on fixe deux entiers naturels et non nuls. On souhaite étudier les classes d'équivalence de couples de matrices pour la relation suivante : on dit que deux couples ( ) et ( ) sont simultanément équivalents s'il existe deux applications linéaires et et des bases e et de et et de telles que et soient les matrices de dans ( ) et ( ) et et celles de dans ( ) et ( ) respectivement.
Pour dans on définit les matrices suivantes:
Une réduction
Soient et deux couples de matrices dans . Démontrer que les conditions suivantes sont équivalentes :
(i) et sont simultanément équivalents;
(ii) il existe et telles que et ;
(iii) il existe telle que et .
Désormais, on fixe les matrices et et on note simplement à la place de .
Deux applications linéaires : décomposition
a) Calculer et, pour un polynôme de , calculer .
b) Démontrer que si un nombre complexe est une valeur propre de , alors est aussi une valeur propre de avec la même multiplicité.
c) Soit le polynôme caractéristique de . On l'écrit où est un entier et est un polynôme dont le coefficient constant n'est pas nul. Justifier brièvement que
et vérifier que ces sous-espaces sont stables par .
On dit que deux couples de matrices ( ) et ( ), toutes de même taille , sont simultanément semblables s'il existe tel que et .
Deux applications linéaires : cas nilpotent
Dans cette question, on suppose que est nilpotente.
Démontrer que ( ) est simultanément semblable à un couple de matrices diagonales par blocs dont les blocs diagonaux sont respectivement de la forme
où et sont des entiers naturels avec et et forment l'un des couples suivants :
Deux applications linéaires : cas inversible
Dans cette question, on suppose que est inversible.
a) Démontrer que et que et sont inversibles.
b) Démontrer que ( ) est simultanément semblable à un couple de matrices diagonales par blocs dont les blocs diagonaux sont de taille paire et sont respectivement de la forme
où
pour entier non nul et complexe non nul convenables.
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